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Bulle Derouette : Une artiste engagée aux oeuvres vivantes

Peintre, céramiste et professeure d’arts plastiques, la pétillante Bulle Derouette exprime son regard sur la société à travers des œuvres réalistes et pop aux couleurs éclatantes. Pour ce nouveau numéro d’été, elle nous éclaire sur son parcours, sa création et ses projets dont ses nouvelles toiles grand format et ses prochaines expos.

Ton histoire, ton parcours artistique en quelques mots ?
J’ai suivi des études au Lycée des Arts Graphiques Corvisart à Paris où j’ai obtenu un diplôme de dessinatrice d’exécution en publicité puis à l’IAV (Institut d’arts Visuels) d’Orléans. J’ai obtenu un DNAP (Diplôme National d’Arts Plastiques) en Design objet, mention bien ! En 1998, direction Paris, après quelques petits boulots alimentaires je suis rentrée dans une agence qui réalisait essentiellement des flyers de soirées, c’était génial pour moi qui sortait beaucoup à l’époque. Ensuite, repérée par un agent d’illustrateurs, j’ai réalisé un grand nombre de projets pour différentes marques… Quelques années plus tard nous avons créé avec une amie une marque de vêtements pour enfants : Cocotruc.
Parallèlement à ça je peignais et exposais régulièrement à Paris.En 2011, de retour à Orléans, j’ai intégré un atelier pour me mettre à la peinture à l’huile, avant je ne peignais qu’à l’acrylique. J’ai intégré la Société des Artistes Orléanais, et j’ai exposé de plus en plus régulièrement

Tu peux nous en dire un peu plus sur tes activités ?
Il y a quelques années, j’ai participé à un atelier de peinture avec des enfants de primaire, j’ai posté les photos sur Facebook et quelques jours après on me proposait un poste de professeure d’arts-plastiques dans un collège. Cela fait donc maintenant 3 ans que j’exerce ce métier. J’aime beaucoup cet échange avec les ados et j’ai un emploi du temps qui me permet de peindre 3 jours complets dans la semaine. Mais ce n’est pas suffisant et avec le temps j’en ressens une frustration. Je travaille beaucoup pour pouvoir allier ces 2 activités, du 7 jours sur 7 ! L’idéal serait que je trouve une galerie et que je ne fasse plus que de la peinture, à terme c’est ce que je souhaite.

Comment tu définis ton langage visuel ?
On dit très souvent quand on parle de mon travail que je suis une artiste féministe engagée. Mais pas que, pour moi, il s’agit aussi d’un d’un regard sur la société. Je ne peins pas le « beau » à proprement parler. Je peins la réalité, ma réalité. Ce que j’aime, c’est mélanger l’ancien (par la composition de mes natures mortes) et le moderne comme on mélange l’huile et le vinaigre. En agitant bien fort pour que les couleurs jaillissent et que les peintures prennent vie spontanément. Je montre parfois ce qu’on a un peu de mal à voir. Comme lorsque je peins la précarité menstruelle, le mal être des adolescents, la ménopause, l’oppression des femmes dans le monde… Mais je traite évidemment des thèmes plus gais !

NEON MON CORPS ABUZONE

Quels sont tes outils et techniques de travail ?
J’utilise les outils de base : toiles, pinceaux, chevalet, peintures à l’huile, liants, médiums, essences de térébenthine… La plupart du temps j’achète les châssis entoilés mais il peut arriver que j’ai besoin d’un format spécifique et dans ce cas, je fais faire le châssis et l’entoile moi-même. Ensuite je ne peins pas directement dessus. Je repasse des couches et des couches de Gesso (un apprêt) et je ponce à la main, jusqu’à ce que la toile soit très très lisse. J’aime cet aspect lisse et comme je vais très loin dans la finesse des détails, je n’aime pas le grain de la toile.. Je travaille d’après photo, photos que je réalise évidemment moi-même. Lorsque j’ai bien mon sujet en tête, je recherche tous les éléments qui vont constituer ma nature morte. Je trouve souvent tout ce dont j’ai besoin chez moi, mais il arrive fréquemment que je parte en « expédition » pour dénicher des objets. Lorsque la photo est prête, je reproduis la composition au crayon sur ma toile, souvent il m’arrive de faire un sépia avant de poser la peinture. Il s’agit de marquer toutes les ombres plus ou moins fortes.

Sur quoi travailles-tu en ce moment ? De nouveaux supports ?
En ce moment je travaille sur un format plutôt grand et inhabituel pour moi : 110 x 110 cm. Je n’ai réalisé que 2 formats de cette taille depuis que je peins, mais j’ai envie de m’y mettre. Mon atelier n’étant pas très spacieux, c’est moins facile de peindre de très grandes toiles. Et « à cause » de ma technique c’est très très laborieux de peindre sur des grands formats. Cette nouvelle peinture va illustrer l’âge, le temps qui passe.

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La Céramique…
La céramique j’en ai pratiquement toujours fait. J’ai encore des petites sculptures réalisées lorsque j’avais 18 ans. Elles sont très fragiles puisqu’à l’époque je n’avais pas de four et je les peignais à la peinture acrylique, elles n’étaient pas émaillées ! La céramique raisonne avec ma peinture, c’est la mise en relief de mon travail pictural. Je Ces 2 techniques se complètent et se répondent. Mais en céramique je me « lâche » un peu plus. J’ai moins besoin d’avoir un résultat ultra précis. Il m’arrive parfois de peindre pendant 3h, puis de me mettre à la terre pendant 1h ou 2 et de reprendre ma peinture. L’été dernier j’ai exposé pendant 3 semaines dans un lieu à Orléans, j’avais fait pour l’occasion une dizaine de toutes petites céramiques en forme de seins. Je réalise aussi des grandes cigarettes qui ont également leur petit succès, je n’en ai même pas une pour moi car sitôt sorties du four, elles partent.. !

Ta collaboration la plus inattendue, la plus singulière ?
On ne peut pas parler d’une collaboration inattendue, mais cette année j’ai participé à une grande exposition collective qui s’appelle le Loire Art Show à Orléans. C’est une exposition qui a lieu dans des endroits atypiques d’Orléans comme l’ancien hôpital, le Palais de sports, les vinaigreries…Cette année elle avait lieu dans un collège. Chaque artiste disposait d’une salle de classe et peignait l’intégralité des murs.
Ca a été une grande joie pour moi d’y participer.

Un artiste incontournable ?
Difficile de répondre à cette question tant il y a d’artistes dont j’admire le travail. Alors je vais tricher..Il y en a 3 que je suis depuis des années : Till Rabus, Christian Van Minnen et Mark Ryden. Je n’ai cité aucune femme, pourtant il y en un grand nombre que j’admire comme Alice Neel qui s’intéressait particulièrement aux personnes en marge de la société américaine en raison de leur genre, orientation sexuelle, origines ou classe sociale.

Une œuvre d’art emblématique ?
Je suis complètement amoureuse d’une peinture d’Otto Dix réalisée en 1926 qui s’appelle « Portrait de la journaliste Sylvia Von Harden ». Elle se trouve au Centre Pompidou. J’en ai une reproduction au dessus de mon lit. Et sur le mur d’en face une peinture que j’ai réalisé en 2012 dans laquelle j’avais repris le fond rose d’Otto Dix. Pourquoi je l’aime ? Je ne me suis jamais posée la question mais maintenant que je me la pose ça me parait évident : une femme, du rouge sur ses lèvres, du rose, beaucoup de rose, des cigarettes, un cocktail et 2 grandes mains…Des éléments récurrents dans mon travail.

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Un musée à visiter absolument ?
Je me sens bien dans la plupart des musées que je visite. Mais je dois dire que j’ai peut-être une petite préférence pour le Centre Pompidou. Souvent avant une expo, je me pose dans la cafétéria qui surplombe le hall et je regarde les gens déambuler. Et puis j’adore regarder Paris depuis la chenille (escalator) qui nous emmène vers les hauteurs !

La dernière expo que tu as vue ?
La dernière fois que je suis allée à Paris pour mon « marathon expos » j’ai vu : « Jean Hélion » au Musée d’Arts Modernes, « Le monde comme il va » à la Collection Pinault / Bourse du commerce et au Palais de Tokyo : « Toucher l’insensé » et « Dislocations » (expos collectives), Chloé Bensael, Mohamed Bourouissa.

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L’endroit idéal pour déconnecter ?
N’importe où tant que je ne suis pas chez moi. Sinon, je suis dans mon atelier et je travaille. Si je passais 2 mois de vacances à la maison, je ne pourrais pas déconnecter. Je culpabilise dès que je suis dans mon canapé devant un film ou avec un livre. C’est plus fort que moi…Mais sinon, pour déconnecter totalement la montagne et plutôt l’hiver. Et puis évidemment la plage avec une bonne pile de bouquins. Et aussi, tout simplement dans un musée.

Ton disque du moment ?
En ce moment j’écoute en boucle Bibi Club, un groupe québécois découvert par hasard. Le titre de l’album va être bientôt d’actualité pour moi puisqu’il s’appelle « Le soleil et la mer ». J’adore.
Un film qu’il faut avoir vu au moins un fois dans sa vie ?
J’ai enfin pu voir « Jeanne Dielman, 23 quai du commerce, 1080 Bruxelles » le chef d’œuvre de Chantal Ackerman qui cache sous un huis clos un regard politique et montre l’aliénante condition ménagère d’une femme des années 1970. La femme est jouée par la merveilleuse Delphine Seyrig. Il dure 3h et a été sacré « meilleur film du monde en décembre 2022.

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Tes actus et prochains projets ?
J’ai réalisé début avril une fresque sur le Mur d’Orléans. Visible jusqu’au 1er juillet. Lorsque le magazine sortira la fresque ne sera plus là mais on peut la voir sur mon compte Instagram. J’ai vraiment aimé travailler sur ce format et j’aimerais réaliser d’autres murs, je suis donc ouverte à toutes propositions dans la mesure du possible !
Je participerai au 117ème salon des artistes Orléanais en octobre prochain. D’autres évènements vont suivre mais je n’ai pas encore les dates, vous pourrez suivre ça sur les réseaux.

Pour te suivre en ligne ?
Je suis très active sur Instagram :
instagram.com/bulle_derouette
On peut voir également mon travail sur mon site :
www.bullederouette.fr
J’ai laissé mes anciens projets graphiques ici :
www.behance.net/mademoisellebulle

Un dernier mot ?
Vive la peinture, vive l’art, vive la vie !

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