Tattoo artist depuis près de 20 ans, Caroline Karenine est aussi une brillante plasticienne dont la pratique s’est ouverte à la céramique ainsi qu’au travail du textile et du papier. Véritable autodidacte qui ne quitte jamais ses aiguilles pour marquer et tisser, elle nous invite à un captivant voyage graphique et émotionnel.
crédits photos : Segolene Accaries / Bruno Fabris / Nicolas Giquel
Hello Caroline, comment ça va ?
Ca va très bien. Je suis très heureuse de réaliser cette interview avec vous !
Ton histoire, ton parcours artistique en quelques mots ?
J’ai un parcours quelque peu inhabituel. Après avoir suivi des études en communication visuelle et en histoire de l’art, j’ai finalement appris le tatouage en autodidacte, réalisant ainsi un rêve d’enfance. Et cela fait 19 ans que je pratique cette discipline. Mais ma carrière ne s’est pas simplement limitée à la peau puisque je suis également artiste plasticienne.
Tu peux nous en dire un peu plus sur tes activités ?
Ma principale activité consiste à réaliser des tatouages, souvent de grande envergure, qui peuvent couvrir tout le corps ou plusieurs parties de celui-ci. C’est ce que je préfère faire et c’est ma spécialité. Cette pratique me permet d’établir des liens forts avec mes clients et de créer quelque chose d’intime où nous pouvons véritablement exprimer l’essence de leur personnalité. Chaque paysage que je crée est constitué de fragments variés de matières telles que le papier et la porcelaine. J’intègre également des éléments de broderie, utilisant du fil de soie, de la laine tissée ou brute. Ce processus est un voyage à travers mon inconscient, où je découpe en fragments des souvenirs de mon enfance. L’assemblage de ces souvenirs donne naissance à une nouvelle vision, accompagnée d’une expérience émotionnelle inédite dans laquelle le spectateur peut se plonger.
Tu partages ton temps entre tattoo, céramique et illustration ?
En effet, je répartis mon temps entre le tatouage et la céramique, ainsi que la découpe de papier, la recherche de laine et de textiles dans les brocantes. En parallèle, je consacre aussi du temps à ma famille, aux voyages et aux déplacements professionnels.
Comment tu définis ton langage visuel ?
Dans le domaine du tatouage, j’ai élaboré un langage visuel distinct en faisant des choix précis de lignes, de tailles et d’épaisseurs. Ma technique implique également une répartition stratégique entre des zones de vide et des zones très denses. Certaines parties sont délibérément simples, réalisées uniquement en noir, tandis que d’autres sont incroyablement détaillées. Cette approche me permet de créer une structure cohérente dans laquelle je peux intégrer l’univers de chaque individu tout en préservant ma propre identité artistique. En tant que plasticienne, mon langage artistique se construit à travers des choix de matières et de formes que je conserve et assemble de manière libre et intuitive.
Quels sont tes outils et techniques de travail ?
En tatouage, mes outils de travail n’ont pas vraiment changé depuis longtemps. J’utilise toujours une Koi pour mes lignes les plus épaisses, et deux machines rotatives pour réaliser des lignes plus fines et moyennes, ainsi que pour les aplats de noir. Les tailles d’aiguilles que j’utilise sont toujours les mêmes, et je travaille principalement avec du noir, parfois en ajoutant une couleur, souvent du rouge.
Dans mes autres créations en dehors du tatouage, j’utilise toujours du papier, de la laine, du tissu, et parfois de la porcelaine. Mais on retrouve toujours des aiguilles pour marquer ou pour tisser !
Qui sont tes clients ?
Mes clients sont généralement des personnes cultivées, affirmées dans leur vie et leurs choix, engagées dans leur profession ou leur passion. Ils sont patients, impliqués dans leurs projets de tatouage, mais également à l’aise avec le lâcher-prise et la confiance.
Sur quoi travailles-tu en ce moment ? De nouveaux supports ?
Actuellement, je suis très investie dans mon rôle de plasticienne, et je vais me concentrer principalement sur la création artistique impliquant du tissu et de la sculpture. C’est mon nouveau projet en cours de développement.
Ta collaboration la plus inattendue, la plus singulière ?
Une collaboration que j’ai particulièrement appréciée a été la création de bijoux, incluant un jonc, deux colliers et une paire de boucles d’oreilles. Cette expérience a été une véritable aventure, car elle m’a offert l’opportunité d’être présentée dans Vogue et de participer à deux Fashion Week à Paris et New York avec la marque In cauda Venenum. C’était extraordinaire de plonger au cœur de l’univers de la mode, d’assister aux défilés, le tout dans des lieux magnifiques.
Celle dont tu rêves ?
Broder un paysage sur une robe de haute couture, au sein d’une maison de luxe, serait pour moi un véritable défi. C’est un projet que je rêverais de réaliser.
Un artiste incontournable ?
Ruth Asawa
Une œuvre d’art emblématique ?
Les Nymphéas, Claude Monet
Un musée à visiter absolument ?
Très difficile de n’en citer qu’un… mais peut être l’Orangerie à Paris simplement pour la pièce dédiée aux Nymphéas et la sérénité qui s’en dégage.
La dernière expo que tu as vue ?
Germaine Richier
L’endroit idéal pour déconnecter ?
Le Japon ou les montagnes suisses
Ton disque du moment ?
Charlotte Day Wilson
Un film qu’il faut avoir vu au moins un fois dans sa vie ?
La Famille Tenenbaum de Wes Anderson
Quel est ton regard sur l’IA et l’utilises-tu ?
Je pense que comme toute avancée technologique, c’est un outil merveilleux, mais personnellement, je ne suis pas très à l’aise avec cela, alors je laisse les autres s’en servir !
Tes actus et prochains projets ?
Pour l’instant, je me concentre principalement sur l’expérimentation, sur le développement de ma technique et de ma créativité. Je travaille à améliorer ces aspects et nous verrons comment cela influencera mes projets à venir.
Pour te suivre en ligne ?
www.carolinekarenine.com
Insta tattoo : carolinekarenine_ttt
Plasticienne : carolinekarenine_
