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Maia FLORE – Interview

Entre les États-Unis et la France, Maia Flore explore le champ photographique à travers une pratique plus artistique où le dessin jour un rôle central. Ses œuvres prennent la forme de tableaux dans lesquels se mettent en scène les corps en mouvements dans une poésie visuelle singulière. Pratiquant également la peinture, elle revient sur sa présence à Paris Photo début novembre et évoque ses projets actuels dont une série en noir & blanc et une collaboration avec une illustratrice.

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France, 2015 Rememories. Maia Flore / Agence VU

Bonjour Maia, pour démarrer, retracez-nous votre parcours et vos débuts en tant que photographe professionnel ?
L’agence VU’ m’a envoyé un mail quelques mois après ma sortie des Gobelins, j’ai cru que c’était un spam très bien formulé. Puis ils m’ont appelé, je les ai rencontrés et je suis ressortie du 58, rue Saint Lazare avec un contrat signé. J’avais 20 ans alors j’ai décidé de me lancer. Cette même année, j’ai été exposée à Arles et à « Circulations » à Paris. J’ai commencé à travailler en commande par la suite sur des projets divers comme La Fashion Week pour Le Monde, des bijoux pour Cartier, des centres culturels comme Les Champs Libres à Rennes ou le CND de Lille. En 2013, la série Morning Sculptures était aux Sony Awards, en 2014 c’était le PDN à New York qui a sélectionné mon travail et en 2015 j’ai eu le prix HSBC et publié une monographie aux éditions Actes Sud. J’ai la chance d’être représentée aux États-Unis et en France pour les commandes et la galerie et depuis quelques années je travaille entre ces deux pays. J’ai aussi travaillé comme directrice artistique pour le magazine Kinfolk.

Vous aviez auparavant travaillé sur le collage et le dessin… Comment utilisez-vous ces techniques aujourd’hui sur vos projets ?
Je les utilise comme un accès spontané aux images qui passent dans ma tête. Il y a des pensées et au bout de ma main un crayon, ils font leur histoire ensemble. Aujourd’hui je m’amuse aussi beaucoup avec la peinture et ma galerie m’a proposé de montrer mes recherches. Partager cette phase de mon travail m’a demandé beaucoup de lacher-prise dans un exercice qui peut paraitre très contrôlé. Revenir à cette chose fondamentale qu’est la transmission directe de ma pensée vers le papier est un des moyens que j’ai trouvé pour que le temps ne m’échappe pas totalement.

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Big Head Poetry, 2011 Maia Flore / Agence VU

Votre univers créatif se construit à travers des expérimentations sur le mouvement, les paysages, le corps et sa présence dans l’espace ?
Oui, c’est cela : le corps, l’espace et le temps. A cela on y ajoute de la vie : des mouvements, des sentiments, des situations. Et j’ai trouvé mon terrain de jeu avec ces règles-là. C’est aussi un questionnement que j’essaie de résoudre tant dans mes projets photographiques que dans les décisions de ma vie personnelle. Pour le moment cette recherche m’emmène vers beaucoup de voyages et d’itinérance.

Vos œuvres s’apparentent d’ailleurs davantage à des tableaux photographiques…
Oh merci ! Je suis heureuse de lire cela car il me semble que cette idée de tableau m’emmène dans une poésie intemporelle, une dérive du temps. Et puis dans chaque médium, j’aime ce qui permet de croiser des pratiques. Une photographie comme tableau ou une installation qui donne la sensation de vivre un film.

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Votre projet Le Voyage Fantastique a fait le tour du monde pour être exposé… pouvez-vous nous en parler plus en détails ?
Le Voyage Fantastique est une commande sous forme de Carte Blanche. C’était un appel d’offre envoyé par le Ministère de la Culture et Atout France afin de créer des images contemporaines sur notre patrimoine français. Ce projet tombait à un moment où j’avais très envie de revisiter ma culture et mon éducation alors que je m’installais aux États-Unis. Dans ce projet, j’ai proposé de garder la place des visiteurs qui passent dans ces lieux en imaginant que nous ayons tous un moment d’égarement qui se trouve être notre moment de rêve, de laisser aller. Mais je n’avais aucune idée de la direction que le projet allait prendre et voulais m’inspirer de l’Histoire. Il se trouve que plus je découvrais les destinations plus le projet s’enrichissait car chaque lieu était singulier. Ce voyage c’était trois mois de rêves dans lequel je me levais chaque jour en me demandant quelle serait l’image dans laquelle j’allais vivre une nouvelle histoire, quel château, quelle église… Alors pourquoi ne pas s’étaler dans la chambre des secrets d’Henri IV ou aller poser son portrait dans le Château de Beauregard au milieu de quatre siècles d’histoires. L’exposition était montrée dans un lieu en Europe et à l’International chaque mois et grâce au réseau des Instituts Français qui l’ont appréciée, elle n’a cessé de voyager ! Le Japon, le Brésil, l’Argentine, la Corée. Elle s’est fait un joli tour du monde, je l’ai rejoint de temps en temps.

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Italy, Venice, 27 April 2012 Along French, Italian and Swiss borders, competitors came back up the Alps before reaching Venice, final stop of the race. In front of Vuitton shoe factory. Italie, Venise, 27 avril 2012 Le long des frontières françaises, italiennes et suisses, les concurrents ont remonté les Alpes avant de redescendre sur l’Italie et rejoindre Venise, ultime but de la course. Devant la manufacture de souliers Vuitton. Maia Flore / Agence VU

Vous avez réalisé une série sur la Serenissima Race Louis Vuitton pour Sport & Style. Cette fois-ci, il s’agissait de saisir le mouvement des voitures et non des corps ?
Cette série était ma toute première commande et le DA qui m’avait lancé dessus avait été audacieux. Il m’a laissé carte blanche en sachant que ce processus de travail me demanderait de m’adapter a du reportage, à l’opposé de ma manière de poser les scènes avec mes personnages. Vitesse et objets. Finalement j’ai trouvé quelque chose de très organique dans le mouvement des voitures et les matières qui composent cet univers automobile. J’ai aussi réalisé tout simplement que l’appareil photo me permettait d’être avec des gens et des situations et partager ensemble une situation dans laquelle nous pouvions nous amuser que parce que j’ai cet outil entre les mains.

Vous avez participé à Paris Photo avec la galerie Esther Woerdehoff… De quelle manière participez-vous à ce type d’évènement ?
La galerie a présenté plusieurs pièces durant Paris Photo qui ont été réalisées pour ma dernière exposition solo qui avait lieu en mars 2018. Cette année, je suis arrivée au Grand Palais en pensant à une discussion que j’avais eu avec mon grand-père. Il me racontait l’enthousiasme autour de la foire pour voir les nouveautés de son époque, c’était l’endroit où tout se dévoilait. Je suis arrivée là-bas en quête de nouveauté pour mon œil avec un enthousiasme naïf et débordant. Et ainsi je me suis retrouvée à aller vers des images de natures mortes, j’ai beaucoup aimé les images de Hi Williams, Gordon Coster, Edward Quigley qui sont tous les trois des photographes américains du début du XXème siècle. Mais ce même sentiment de nouveauté a aussi habité ma propre pratique. Je travaillais le soir mes croquis que j’emmenais le lendemain mati à ma galerie car étonnamment, les visiteurs semblaient intéressés par ces pièces.

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France, Deauville, 22 March 2016 From the series “L’enchantement va de soi”. France, Deauville, 22 mars 2016 Issue de la série “L’enchantement va de soi”. Maia Flore / Agence VU

J’ai vu que vous réalisiez des tirages sur des papiers de création…
Oui, le support sur lequel je tire est vraiment important pour raconter l’histoire qui va avec. Je ne ressens pas mes images sur un papier photographique comme je les retrouve sur un papier texturé. Pour ma dernière exposition, j’ai aussi travaillé avec un papier transparent et des impressions sur du verre ou de la toile que j’ai ensuite découpée.

Quel est votre regard sur l’utilisation actuelle des réseaux sociaux d’images comme Instagram ?
Mon regard est sollicité dans un flux de scroll, de swipe, de clic, de stories. Tout un vocabulaire que lui fait subir mon pouce en activant sa danse sur mon téléphone. Je suis très enthousiaste à l’idée d’être entourée d’images et d’y avoir accès si aisément et aussi démunie du peu de temps que je prends pour les apprécier. Il me semble que cela influence ma manière de procéder dans mes projets, je me sens toujours en retard alors même que je fais des images pour prendre mon temps.

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Quels sont vos projets pour les semaines à venir ?
En ce moment je cherche à terminer certains projets pour lesquels j’ai invité des amis à collaborer. Il y a une série en noir et blanc avec du texte, une autre avec une illustratrice avec qui nous nous sommes retrouvées en résidence à Los Angeles. Et puis je serai en workshop prochainement à l’Agence VU’ à Paris, dans la même semaine je finis une production pour un magazine et j’en commence une autre pour une maison de Champagne.
Maia Flore est représentée par l’Agence VU’

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http://www.maiaflore.com

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Ancien commis de cuisine du Cheval Blanc de Lembach dans les années 90, Pascal

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